Affaire Fillon : Alain Juppé est prêt

2017-03-03 04:08:45 - Ses lieutenants Benoist Apparu, Edouard Philippe et Christophe Béchu viennent de lâcher François Fillon. Combien de temps le candidat peut-il s'accrocher ?

« Alain Juppé est prêt, depuis le début », glisse l'entourage du maire de Bordeaux. Dans une atmosphère de conciliabules tactiques, François Fillon a repoussé cette hypothèse et maintient sa candidature malgré sa convocation chez les juges le 15 mars dans le cadre de l'affaire des emplois présumés fictifs. Mercredi matin, Alain Juppé était à Paris à l'occasion d'une rencontre entre les présidents de métropoles et le Premier ministre, Bernard Cazeneuve. Appelé par Fillon, le maire de Bordeaux lui dit qu'il est « prêt à se rendre disponible pour mener la campagne », confie son entourage.
 
Douche froide de la part de Fillon, convaincu d'être le seul à pouvoir faire gagner la droite : « Pas du tout, je te demande de me renouveler ton soutien. De toute façon, Sarkozy ne veut pas de toi. »
 
Assez fâché, Juppé s'est, par la suite, entretenu avec les grands élus locaux à Matignon (Christian Estrosi, Jean-Claude Gaudin, Jean-Luc Moudenc, Gaël Perdriau...) ainsi qu'avec Valérie Pécresse, laissant échapper quelques bribes de sa conversation avec Fillon. « C'est un suicide collectif. Ce n'est plus du tout rationnel. Ça ne sert à rien de reprendre la barre dans ses conditions », fulminait Juppé, sur le coup d'une colère froide. Le maire de Bordeaux n'affichera plus son soutien à Fillon, mais il gardera le silence de manière à ne pas nuire.
 
« Le plan B n'a jamais eu la tête d'un quinqua »
 
Nicolas Sarkozy, de son côté, considère que Fillon doit maintenant trouver des forces en lui-même, en s'assurant que sa famille tienne le choc de l'épreuve judiciaire. « Je lui ai déjà sauvé la mise une première fois. Je ne le ferai pas une deuxième », aurait lâché l'ancien chef de l'État, selon ceux qui lui ont parlé.
 
Aucun des ténors n'appellera à la candidature d'Alain Juppé, car cette tentative, sans l'aval de Fillon, serait vouée à l'échec. « L'électorat de Fillon s'est tellement radicalisé qu'il ne peut pas se rallier à Juppé, sauf si Fillon lui-même appelle à soutenir Juppé », glisse-t-on au siège des Républicains. Nicolas Sarkozy, quant à lui, était favorable à une solution Baroin, mais, là non plus, aucun accord chez les quinquas. 
 
« Le plan B n'a jamais eu la tête d'un quinqua », lâche Xavier Bertrand, le président de la région Hauts-de-France. Pécresse et Bertrand sont sur une ligne très proche : tous deux ont dit à François Fillon qu'il tenait son destin entre ses mains, qu'il devait donner toute son énergie dans la campagne, réimposer ses thèmes et retenir ses soutiens.

Une tribune anti-Fillon circule chez les sénateurs LR
 
Or, l'hémorragie a commencé : outre Bruno Le Maire, l'UDI réserve son soutien. « Toutes les options sont sur la table », déclare au Point Jean-Christophe Lagarde, le président de l'UDI qui réunira la semaine prochaine son bureau exécutif pour prendre une décision définitive. Toutes les options, cela veut dire que l'UDI attend de savoir si Juppé s'impose comme une solution de remplacement et sinon, l'idée de se retourner vers Macron sera également examinée. « Je ne suis pas sûr que la droite réalise ce que ce serait de perdre le soutien du centre », ajoute Lagarde.
 
D'autres initiatives sont engagées. La sénatrice juppéiste Fabienne Keller fait actuellement circuler une tribune chez les sénateurs appelant au désistement de François Fillon. Des barons locaux sont également en train de se concerter autour d'un texte appelant à son retrait.
 
Valérie Pécresse, quant à elle, n'a pas du tout apprécié l'appel à la manifestation « contre le complot des juges ». Si elle soutient le candidat Fillon, elle n'approuve pas l'option d'une guerre menée contre l'autorité judiciaire, une attitude assimilable aux pratiques du Front national. Nadine Morano, consultée mercredi par Fillon, lui a demandé de se retirer « pour mieux se défendre ». « Il y a un complot politique contre la droite, la meilleure façon de le faire échouer est que Fillon cède la place à un candidat qui puisse gagner cette élection. Ça va bien au-delà de ta personne », a plaidé la députée européenne, favorable quant à elle à une candidature de François Baroin.

PAR EMMANUEL BERRETTA

: France Monde